YI

file:///C:/Users/Utilisateur/Downloads/yi%20ideogramme.html

 

L’idéogramme Yi est formé par la juxtaposition de deux signes.

En haut, une sorte de carré avec un trait à l’intérieur, c’est le signe du soleil.

En dessous, comme des filaments, c’est la représentation de la pluie qui tombe.

Soleil et pluie, est-il réalité plus naturelle, phénomène plus quotidien ?

Pour les Chinois – peuple sédentaire et cultivateur – Pluie et soleil sont aussi nécessaire l’un que l’autre. L’un sans l’autre leurs bienfaits s’annihilent, l’un avec l’autre leurs bienfaits se multiplient.

  1. Ainsi, le tout premier sens de ce caractère est donc de désigner les « changements de temps ». Ensuite de soleil en pluie et de pluie en soleil, chacun peut constater que le temps change constamment.
  2. Le deuxième sens de l’idéogramme Yi est simple, facile. En effet, quoi de plus aisé que de constater le changement de la pluie et du soleil. Il suffit de laisser passer le temps.
  3. Le troisième sens usuel est plus surprenant, yi signifie également loi fixe.

 C’est pourtant la conclusion que chacun pourra tirer de l’évidence naturelle de la transformation universelle. Puisque tout change tout le temps, le changement est la seule loi qui vaut et prévaudra toujours, en conclut le pragmatisme chinois, la seule base solide sur laquelle bâtir une stratégie de l’action.

Voilà pour le décryptage de ce premier idéogramme.

 

Pour aborder cette notion de YI, je vous propose une entrée plus philosophique et poétique : 

François Cheng, poète, historien de l’art, écrivain et essayiste nous entretient sur la beauté et nous rappelle qu’elle est rencontre.

Rencontre de l’âme avec l’univers vivant,

rencontre du visible avec l’invisible,

de l’immanence et de la transcendance,

rencontre du fini avec l’infini. 

 

 

« Relevant de l’être et non de l’avoir, la vraie beauté ne saurait être définie comme moyen ou instrument. Par essence, elle est une manière d’être, un état d’existence. » 

« La sensation ne saurait se limiter à son niveau sensoriel, et la beauté est bien cette potentialité et cette virtualité vers lesquelles tend tout être. »

« (…) Du mot français « sens », nous glissons vers un caractère chinois qui lui est équivalent, sinon en plus riche, le caractère Yi

À sa base, l’idéogramme Yi désigne

 ce qui vient de la profondeur d’un être, l’élan, le désir, l’intention, l’inclination.

 

L’ensemble de ses sens pouvant être englobé approximativement dans l’idée d’ « intentionnalité »

Combiné avec d’autres caractères, il donne une série de mots composés aux sens variés mais ayant entre eux des liens organiques : on peut grosso modo les ranger sous deux catégories, 

  1. ceux qui relèvent de l’esprit : idée, conscience, dessein, volonté orientation, signification ; 
  2. ceux qui appartiennent à l’âme : charme ,saveur, désir, sentiment, aspiration, élan du cœur. 

C’est dans la mesure où le Yi, dans une œuvre particulière, atteint son plus haut degré, jusqu’à résonner en harmonie avec le Yi universel, que cette œuvre acquiert sa valeur de plénitude et de beauté.

Aux yeux d’un Chinois, la beauté d’une chose réside donc dans son Yi, cette essence invisible qui la meut.

C’est le Yi qui est sa saveur infinie, qui n’en finit pas de susciter parfum et résonance. »

« Pour les Chinois, la beauté est ternaire : la vraie beauté

– celle qui advient et se révèle, qui est un apparaître-là touchant soudain l’âme de celui qui la capte-

résulte de la rencontre de deux êtres, ou de l’esprit humain avec l’univers vivant.

 Et l’œuvre de beauté, toujours née d’un « entre » est un trois, qui, jailli du deux en interaction, permet au deux de se dépasser.

Si transcendance il y a, elle est dans ce dépassement. » (p. 146)

 

Dans les ARTS INTERNES comme le qi gong, le tai ji quan, la notion d’intention est primordiale.

La définition de l’intention est le fait de porter toute l’attention sur un même objet, un même objectif qu’il soit artistique, martial ou dans une visée thérapeutique.

On pourrait résumer le Yi par :

Le Yi est la relation entre l’esprit et l’action

 

 La notion de Yi se rapproche de la définition d’intention mais englobe un concept plus global, plus profond.

Dans la philosophie chinoise, le Yi se traduit par pensée, sens, idée, intention. Le Yi viendrait du cœur, qui selon les anciens est le siège de l’esprit (Shen).

L’esprit (Shen) organise, l’intention (Yi) concentre les moyens et le souffle vital (Qi) circule pour mettre le corps en action.

Si le Yi concerne l’ici et le maintenant le Yi revêt également un caractère persistant et intemporel.

 

Le Yi et le Corps : 

L’intention sur une visée précise

Imaginez que vous faites un acte de poussé des mains dans le vide, le fait de mettre l’intention sur un objet imaginaire à pousser, met en action tous les muscles, les tendons, les ligaments, la circulation de l’énergie vers ce but de poussée.

Un simple mouvement des bras utilise quelques muscles et le mouvement n’a qu’une efficacité limitée.

Un mouvement en conscience prenant en compte tout le corps accumule l’énergie puisée dans la terre, la fait circuler et la concentre au bout de a main pour une efficacité accrue.

Il en résulte un mouvement équilibré dont le rendement énergétique est bien supérieur.

Pourtant, aucune force musculaire n’est requise, en revanche on est bien dans un travail global du corps et de l’esprit.

Si on observe un pratiquant avancé de tai ji quan ou Qi Gong à ce moment, on constate une augmentation de la densité de sa masse musculaire tout en paraissant décontracté et souple.

Le Yi permet ici la possibilité d’une musculation douce et un renforcement des tendons et ligaments.

l’intension globale

Si durant l’exécution de la forme, j’imagine que j’évolue dans une matière visqueuse, dans tous mes mouvements je ressens une résistance, cette résistance se manifeste dans toutes les parties du corps.

 Le fait de penser, de sentir chaque partie de mon corps apporte l’énergie par le Yi et développe le réseau du système nerveux central et périphérique.

Cela aboutit à une force totale du corps, une élasticité, une densité et une résistance multidirectionnelle. C’est ce que cherche tout pratiquant d’art martial. Les bénéfices sont importants.

La répartition de l’effort économise la fatigue tout en équilibrant la circulation du Qi.

L’entraînement fait surgir une force cachée intérieure

qui est différente de la force brute que possède chaque homme à la naissance.

Le développement du réseau du système nerveux central et périphérique peut continuer au-delà de 40 ans où tout progrès produit par l’entraînement brut sans conscience paraît illusoire.

La force de l’attention

Le Yi amène à une conscience de soi dans l’univers. Ce n’est en aucun cas un isolement sur soi coupé du monde. La force de l’esprit permet le voyage interne tout en prenant en compte l’environnement parfois même dans ce qu’il a d’inconfortable ou de dangereux. Tel un aigle, réglant son vol, alerte aux dangers mais toujours fixé sur sa proie.

La maitrise du Yi commence par la maitrise de soi. De l’esprit apaisé peut émaner le YI.

 

La force de l’intention :

Travailler le Yi a pour effet d’atteindre des niveaux de conscience toujours plus élevés dont les effets touchent le corps et l’esprit.

Un entrainement du Yi à un stade très avancé permet de diriger avec le Yi l’énergie, le Qi vers un point précis dans un but de guérison ou d’efficacité dans le mouvement (fa jing).

Le Yi dans son application la plus poussée, aboutit à la transformation le réel : par exemple dans le cas de l’hypnose, de la résistance à la douleur ou de la guérison au toucher ou à distance.

Le Yi obéit aux lois du Yin/ Yang.

 Le Yi est la relation entre l’esprit et l’action, l’action modifie le réel.

 On l’a vu, quand on met l’intention pour accomplir une action, il s’opère un changement à l’intérieur et parfois à l’extérieur.

Le changement perçu est pris en compte par l’esprit qui lui même évolue.

L’intention suivante découle de ce changement dans un cercle vertueux vers la pureté, la beauté de l’action et de la pensée.

 

Le Yi et le Qi-gong:

On utilise la forme pour capter l’intention, on utilise le Yi pour faire apparaître la forme. L’intention naît de la forme, la forme suit l’intention.

la force vient de l’esprit,

la forme obéit à l’esprit,

la forme induit la force…

 

Comment améliorer le Yi ?

La méditation et notamment la méditation de pleine conscience, préconisée par Christophe André, docteur en médecine (le premier à avoir introduit la méditation en psychologie) est un entrainement pour améliorer le Yi.

Le travail régulier d’exercices de qi-gong et taiji quan, la pratique artistique ou sportive sont des éléments qui contribuent au renforcement du Yi si la visée n’est pas uniquement utilitariste.

 

Par exemple, muscler une région de son corps constitue un effort localisé important et induit un déséquilibre énergétique. Il semble important de s’interroger sur sa pratique de mesurer les effets réels sur son bien-être.

 

De la même manière que l’idée précède le pinceau pour un artiste,

Pour le pratiquant des arts internes, la pensée précède le mouvement.

 

 

Le soleil brille

c’est beau et inexorable…

le vent souffle

c’est beau et inexorable…

c’est la force du Yi

c’est beau et inexorable…

 

Si l’Empereur n’est pas mûr, il doit écouter le Yi.

Si l’Empereur est sage, il n’a pas besoin d’écouter le Yi

 

Au début, il faut tout simplement admettre que

le YI a toujours raison

Et que nous avons toujours tort.

Avec le temps,

le YI n’aura pas besoin de se manifester,

car le Shen sera puissant et sage.

 

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